Livre Seconde Guerre Mondiale WWII

Recension “La 3e Division d’Infanterie Motorisée”

Une belle étude d'une de nos meilleures division de 1940

Eric Denis, “La 3e Division d’Infanterie Motorisée. Une unité d’élite dans la tourmente. 1939-1940”

Eric Denis, grand spécialiste hexagonal de la campagne de 1940, nous déjà gratifié de superbes études qui ont fait date (La Wehrmacht de Fall Gelb et L’Armée de Terre française du 10 mai 1940 notamment).

Il récidive avec une étude très poussée -comme à l’accoutumée cet auteur. a dûment épluché les sources primaires- consacrée à la 3e DIM. Son texte, très érudit, est l’occasion de nous présenter ce qu’était une division d’infanterie mécanisée.

J’ai jugé les pages consacrées à la mobilisation et à la “drôle de guerre” particulièrement intéressantes, étant toujours frappé des insuffisances dont souffrait notre armée en 1939-1940, alors même que ses qualités -méconnues du grand public, malheureusement- sont également légion.

La description des événements qui suivent le 10 mai 1940 (le début de l’attaque allemande à l’Ouest) laissent songeurs quand on voit l’exemple du redéploiement de la 3e DIM et de l’incapacité des Français à procéder à une contre-attaque en force vers Sedan: une opportunité a indéniablement été manquée.

Eric Denis consacre évidemment beaucoup de temps à la passionnante et très disputée bataille de Stonne, affrontement qu’il connaît bien (j’en ai profité pour revoir les photographies et les cartes de son très bon hors-série de “Batailles” paru en 2008 et très complémentaire de ce présent ouvrage), pour avoir écrit à plusieurs reprises sur ce sujet (un auteur peu scrupuleux s’en était d’ailleurs largement “inspiré” pour livrer “sa” version). Le récit des combats est vivant, haletant, agrémenté d’encadrés et de témoignages. En filigrane, l’auteur nous présente aussi l’engagement de la 3e DCR, ainsi que l’emploi des différents types de chars. Le modus operandi des unités françaises en 1940 est intéressant à découvrir, de même que les nombreux déboires subis par les Allemands. Les cartes ne manquent pas, quoiqu’il soit ardu de distinguer les Français des Allemands… On apprécie aussi les nombreuses notes explicatives figurant en bas de page (et non en fin d’ouvrage, où elles demeurent invisibles pour la plupart des lecteurs). Quel beau fait d’armes pour l’armée française! Le lecteur peu habitué découvrira aussi que Guderian a failli perdre la vie à Stonne… On découvre aussi que les soldats de la 55e DI peuvent s’avérer de bons combattants.

Le plus intéressant et original sont les ultimes chapitres qui traitent des pérégrinations de la division après Stonne, jusqu’à sa fin, le 18 juin 1940, le jour même où retentit à Londres un appel d’espoir et de continuation de la lutte.

Deux bémols: le recours trop fréquents aux abréviations pour désigner les unités, même si elles sont usuelles et d’époque, qui rend la lecture parfois ardue pour un néophyte, et l’extrapolation du total des tués allemands, qui me paraît élevé (mais je ne suis pas un spécialiste de cette bataille).

Bref, du beau travail, comme à l’accoutumée avec Eric Denis. Les puristes et amateurs apprécieront les ordres de bataille détaillés, tableaux et autres statistiques. Notons aussi que cet auteur sait de quoi il parle. Il sait aussi utiliser les archives, c’est à dire les questionner, et non juste les rapporter. Et il fait aussi partie de ceux qui apportent du neuf à l’historiographie.

Surtout, Eric Denis participe au souvenir des combats de 1940 et met en exergue la valeur de nos combattants de 1940, trop souvent décriés.

En lisant ces pages, on ressent une fierté rétrospective. J’ai beaucoup songé à mon grand-père, qui était alors artilleur dans les environs.