Jouer la guerre. Histoire du wargame:
un très intéressant ouvrage paru aux éditions Passés Composés. Il est signé Antoine Bourguilleau, qui traite d’un sujet qu’il maîtrise à la perfection.
Si les jeux de stratégie peuvent se rattacher à des vénérables ancêtres, comme le jeu d’échecs (l’auteur nous offre de belles pages à ce sujet), c’est en Allemagne, au XVIIIe siècle, que la pratique du Kriegsspiel (orthographié plus tard avec un « s » en moins) est inaugurée, quoiqu’il me semble qu’on prêtait de telles activités à Pyrrhus d’Epire (à moins qu’il ne s’agisse que de simples plans de bataille). L’auteur établit un distinguo avec le wargame, apparu plus tard dans le monde anglo-saxon, mais dans la même lignée. Au fil des pages, le lecteur comprendra que si l’aspect ludique peut l’emporter, surtout chez les civils, il a pu en aller tout autrement.
Reproduire la guerre, au niveau tactique puis stratégique, répond à des besoins, ainsi qu’à des situations spécifiques propres à chaque pays, les institutions militaires y ayant porté un intérêt fort varié, parfois évolutif au sein d’une même nation (cf le cas de la Prusse/Allemagne). La France, à tout point de vue, semble en retrait et en retard à toutes les époques (il faut lire le dernier paragraphe de la conclusion)… Le livre nous explique clairement les différentes approches et l’évolution selon les pays, les enseignements tirés des Kriegspiele/wargames étant parfois surprenants dans leur anticipation (presque) parfaite des faits qui se dérouleront véritablement sur les champs de bataille.
Antoine Bourguilleau articule son propos documenté en trois parties: Kriegsspiel (1600-1900), Wargame (1900-1950) et Simulation Militaire au tournant du XXI e siècle, chacune de ces parties étant subdivisée en trois chapitres.
Le texte est bien réfléchi et nous offre une belle réflexion, n’omettant aucun thème afférent au sujet. Le lecteur découvrira l’apparition des premières simulation de batailles et la raison du succès du concept. Il découvrira des noms tels que Venturini ou Reisswitz, mais aussi Roberts (fondateur du mythique Avalon Hill), etc. On y croise aussi des monarques ainsi que des généraux. Le lecteur comprendra aussi les réticences vis à vis de cette pratique du jeu de guerre, ainsi que la dichotomie qui peut survenir entre la complexité des règles et le réalisme: je me souviens des journées nécessaires à jouer « The Three Days of Gettysburg » (GMT) ou « Edelweiss » (Clash of Arms), tandis que la plupart des scénarios des jeux que je pratiquais (et pratique encore pour quelques-une) requièrent tout de même quelques heures de bonheur ludique (De « SPQR » à « Invasion:Norway » en passant par « Eastwall », pour n’en citez que quelques-uns parmi des dizaines pratiqués). Il est aussi question à plusieurs reprises du hasard, de la « friction » sur le champ de bataille.
Les pages consacrées aux jeux de plateaux de la 2e moitié du 20e siècle ont retenu particulièrement mon attention, ayant été un étudiant particulièrement assidu pour pratiquer ces wargames. Comme tous les passionnés, mes proches et moi-même avons conçu de nombreuses règles pour jeux avec figurines et maquettes ou de plateaux: de ce point de vue, les passages qu’Antoine Bourguilleau accorde à la genèse des jeux de simulation est du plus grand intérêt.
L’ouvrage illustre avec clarté en quoi ces jeux demeurent essentiels aux armées d’aujourd’hui (au-delà des fameuses tables de sable, très courantes au cours de la Seconde Guerre mondiale, ainsi que du fameux Kriegspiel prévu par la Wehrmacht à Rennes… du 6 juin 1944). L’auteur souligne également, comme je l’ai déjà fait dans un article (« De la nécessaire polyvalence de celui qui écrit l’histoire militaire« ), combien le wargame est un outil de compréhension des événements pour l’historien (et de citer John Prados). Ce n’est pas un hasard si je privilégie désormais des jeux tels que « For the People » (GMT, sur la Sécession) ou « Shifting Sands » (MMP, simulant la guerre du désert), où l’introduction aléatoire d’événements historiques offre une coloration réaliste, mais surtout immersive des événements, ce que procure aussi, mais avec d’autres sensations, le combat avec figurines sur un décor réaliste.
Un livre original et bien écrit, passionnant, à dévorer par tous les wargamers, soldats et autres férus de la chose militaire.
Jouer la guerre. Histoire du wargame:
un très intéressant ouvrage paru aux éditions Passés Composés. Il est signé Antoine Bourguilleau, qui traite d’un sujet qu’il maîtrise à la perfection.
Si les jeux de stratégie peuvent se rattacher à des vénérables ancêtres, comme le jeu d’échecs (l’auteur nous offre de belles pages à ce sujet), c’est en Allemagne, au XVIIIe siècle, que la pratique du Kriegsspiel (orthographié plus tard avec un « s » en moins) est inaugurée, quoiqu’il me semble qu’on prêtait de telles activités à Pyrrhus d’Epire (à moins qu’il ne s’agisse que de simples plans de bataille). L’auteur établit un distinguo avec le wargame, apparu plus tard dans le monde anglo-saxon, mais dans la même lignée. Au fil des pages, le lecteur comprendra que si l’aspect ludique peut l’emporter, surtout chez les civils, il a pu en aller tout autrement.
Reproduire la guerre, au niveau tactique puis stratégique, répond à des besoins, ainsi qu’à des situations spécifiques propres à chaque pays, les institutions militaires y ayant porté un intérêt fort varié, parfois évolutif au sein d’une même nation (cf le cas de la Prusse/Allemagne). La France, à tout point de vue, semble en retrait et en retard à toutes les époques (il faut lire le dernier paragraphe de la conclusion)… Le livre nous explique clairement les différentes approches et l’évolution selon les pays, les enseignements tirés des Kriegspiele/wargames étant parfois surprenants dans leur anticipation (presque) parfaite des faits qui se dérouleront véritablement sur les champs de bataille.
Antoine Bourguilleau articule son propos documenté en trois parties: Kriegsspiel (1600-1900), Wargame (1900-1950) et Simulation Militaire au tournant du XXI e siècle, chacune de ces parties étant subdivisée en trois chapitres.
Le texte est bien réfléchi et nous offre une belle réflexion, n’omettant aucun thème afférent au sujet. Le lecteur découvrira l’apparition des premières simulation de batailles et la raison du succès du concept. Il découvrira des noms tels que Venturini ou Reisswitz, mais aussi Roberts (fondateur du mythique Avalon Hill), etc. On y croise aussi des monarques ainsi que des généraux. Le lecteur comprendra aussi les réticences vis à vis de cette pratique du jeu de guerre, ainsi que la dichotomie qui peut survenir entre la complexité des règles et le réalisme: je me souviens des journées nécessaires à jouer « The Three Days of Gettysburg » (GMT) ou « Edelweiss » (Clash of Arms), tandis que la plupart des scénarios des jeux que je pratiquais (et pratique encore pour quelques-une) requièrent tout de même quelques heures de bonheur ludique (De « SPQR » à « Invasion:Norway » en passant par « Eastwall », pour n’en citez que quelques-uns parmi des dizaines pratiqués). Il est aussi question à plusieurs reprises du hasard, de la « friction » sur le champ de bataille.
Les pages consacrées aux jeux de plateaux de la 2e moitié du 20e siècle ont retenu particulièrement mon attention, ayant été un étudiant particulièrement assidu pour pratiquer ces wargames. Comme tous les passionnés, mes proches et moi-même avons conçu de nombreuses règles pour jeux avec figurines et maquettes ou de plateaux: de ce point de vue, les passages qu’Antoine Bourguilleau accorde à la genèse des jeux de simulation est du plus grand intérêt.
L’ouvrage illustre avec clarté en quoi ces jeux demeurent essentiels aux armées d’aujourd’hui (au-delà des fameuses tables de sable, très courantes au cours de la Seconde Guerre mondiale, ainsi que du fameux Kriegspiel prévu par la Wehrmacht à Rennes… du 6 juin 1944). L’auteur souligne également, comme je l’ai déjà fait dans un article (« De la nécessaire polyvalence de celui qui écrit l’histoire militaire« ), combien le wargame est un outil de compréhension des événements pour l’historien (et de citer John Prados). Ce n’est pas un hasard si je privilégie désormais des jeux tels que « For the People » (GMT, sur la Sécession) ou « Shifting Sands » (MMP, simulant la guerre du désert), où l’introduction aléatoire d’événements historiques offre une coloration réaliste, mais surtout immersive des événements, ce que procure aussi, mais avec d’autres sensations, le combat avec figurines sur un décor réaliste.
Un livre original et bien écrit, passionnant, à dévorer par tous les wargamers, soldats et autres férus de la chose militaire.
231 illustrations NARA et IWM légendées en complément de mon livre “La préparation du Jour J”
Recension “Okinawa”
Recension “Une autre histoire des samouraïs”
“LA PREPARATION DU JOUR J” éditions Ouest-France
Recension “Infographie des guerres franco-allemandes”