Antiquité Livre

Recension « Sparte » de Nicolas Richer

Une très belle synthèse, un de ces livres qu’on n’aime pas refermer lorsqu’on en atteint les dernières lignes: on aimerait pouvoir continuer…

Sparte de Nicolas Richer, éditions Perrin, 2018

Passionné d’histoire ancienne, j’ai déjà eu le plaisir de lire plusieurs ouvrages sur Sparte, sous la plume d’éminents historiens. Le plus ancien, celui de Pierre Roussel (de beaux souvenirs, mais dépassé en partie), a été suivi de celui d’Edmond Lévy (de petit format) et surtout de l’ouvrage de Françoise Ruzè, mon ancienne professeur à l’Université de Caen, co-écrit avec Jacqueline Christien. Le défi à relever pour n’était donc pas chose aisée. S’il ne remplace pas les derniers ouvrages (le Ruzè/Christien aborde d’autres problématiques et vice-versa), ce nouveau livre, basé sur une documentation et un travail d’historien des plus sérieux, servi par de bonnes cartes et quelques clichés bien choisis (l’auteur nous gratifie de beaux clichés sur le territoire et les vestiges de Sparte), nous offre en partie une nouvelle perspective et, surtout, s’avère parfaitement complémentaire. A la lecture de Nicolas Richer, l’image renvoyée par Sparte n’est plus celle des clichés négatifs trop souvent véhiculés à son endroit, au contraire d’une Athènes qui devrait être le modèle de toutes les cités grecques, à tout le moins son aboutissement le plus réussi.

Ce livre est de lecture facile, claire, très didactique avec toutes les explications qu’un néophyte est en droit d’attendre, mais aussi suffisamment savant pour combler le spécialiste ou l’amateur éclairé. L’enchaînement entre les chapitres est fluide, suivant un cheminement logique. On y découvre les valeurs de la société spartiate, la vie à l’intérieur de la cité ainsi que sa politique extérieure.

L’organisation sociale si particulière de la cité, sur laquelle aucun auteur traitant de Sparte/Lacédémone ne peut faire l’impasse, est très bien expliquée, même si la réflexion sur les Périèques aurait méritée d’être davantage poussée. L’auteur, qui ose avancer à plusieurs reprise le mot « démocratie », explique très bien le fonctionnement politique de la cité, le statut des femmes et tout ce qui a trait aux citoyens (en quoi sont-ils des Homoioi), leur formation et le problèmes des Spartiates déchus de leurs droits civiques et autres hommes libres mis à la marge. L’importances des mythes, celui de la religion (que je n’ai jamais vu aussi bien traitée dans un livre sur Lacédémone), ainsi que le rôle des rois, questions tout aussi incontournables quand on traite de Sparte, sont parmi les chapitres les plus intéressants. Les aspects économiques ne sont pas négligés et bénéficient d’un traitement intéressant.

Particulièrement intéressé par les aspects militaires, je n’ai guère appris sur les derniers chapitres qui sont consacrés à la guerre, mais la synthèse et les explications de l’auteur ont rendu la lecture de ces événements très plaisante. On comprend bien comment la cité est parvenue à s’imposer en dépit de l’oliganthropie qui la frappait et également pourquoi les Spartiates étaient si peu enclins à mener des opérations en dehors du Péloponnèse.

On regrettera toutefois que l’ouvrage soit essentiellement axé sur la période classique, la période hellénistique étant survolée, de même que les périodes les plus anciennes (d’où l’intérêt de lire les autres, notamment le Ruzè/Christien).

Au final, on a là une très belle synthèse, un de ces livres qu’on n’aime pas refermer lorsqu’on en atteint les dernières lignes: on aimerait pouvoir continuer…

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