Christophe Mommessin, La marine française et la résolution de la question d’Orient (1797-1922), Tolbiac Editions, 2029, 724 pages
Un livre remarquable, fruit de recherches conséquentes et très poussées sur un aspect de la Première Guerre mondiale plutôt méconnu en France : la guerre au Moyen-Orient. Si Gallipoli implique des troupes française, certes en nombre mesuré, alors que la campagne de Salonique (cf Le Front d’Orient de Max Schiavon) constitue le grand engagement français en Orient en 1914/1918, le contingent terrestre des forces françaises est au contraire extrêmement réduit –pour ne pas dire symbolique- dans la campagne de Syrie/Palestine, ainsi que les opérations menées depuis le Hedjaz (voir Du Caire à Damas de Rémy Porte). Sans oublier ni négliger ces aspects, l’auteur nous convie ici à une autre histoire, fort instructive, centrée sur l’action de la marine française. Christophe Mommessin prend de la hauteur en replaçant les événements dans le temps long, nous gratifiant ainsi d’une première partie, aussi longue qu’intéressante, sur la France et la « question d’Orient » depuis des siècles, établissant ainsi le lien entre l’action de nos forces et de notre diplomatie au cours de la Grande Guerre et ce qui fût la politique françaises en d’autres temps.
On ne peut résumer la richesse des informations données par l’auteur. Notons simplement qu’on apprend beaucoup, que les chapitres nous offrent un éclairage bienvenu sur les dessous diplomatiques de la guerre en Orient, au-delà de l’importance accordée au pétrole, le sionisme et les fameux accords Sykes-Picot. La complexité des lieux teint aussi de l’imbrication des religions, des cultures et de peuples et tribus aux antagonismes fluctuants. On croise ainsi des espions, parfois improbables comme le père Jaussen, ainsi que des célébrités, à commencer par Lawrence d’Arabie (dont le rôle magnifié par Hollywood est replacé à sa juste mesure) et son alter ego français, Louis Massignon. Les rapports entre les deux individus, ainsi que les manœuvres britanniques (certes compréhensibles) pour évincer les Français de toute présence en Syrie sont du plus haut intérêt (voir aussi à propos de l’éphémère Légion d’Orient). On mesure combien des îlots apparemment insignifiants, comme Zuqar ou les îles Farasan en Mer Rouge mais surtout Rouad et Castellorizo en Méditerranée (l’objet d’une étude très fouillée et centrale dans cet ouvrage), peuvent revêtir une importance stratégique et diplomatique insoupçonnée. Le propos ne s’arrête pas avec la défaite des Empires Centraux, mais se poursuit avec le récit des événements d’après-guerre, mettant en lumière les raisons de l’échec des Français à s’établir en Anatolie, ainsi que celui de Faycal, que Lawrence a vainement mis en avant pour contrer les ambitions françaises.
Les cartes et les photographies sont appréciables. On regrettera cependant l’absence d’index, même si la table des matières, dense, facilite la recherche.
Une belle lecture, chaudement recommandée. Christophe Mommessin est donc l’un de ces nombreux écrivains de talent que compte (ou a compté) notre armée.
Christophe Mommessin, La marine française et la résolution de la question d’Orient (1797-1922), Tolbiac Editions, 2029, 724 pages
Un livre remarquable, fruit de recherches conséquentes et très poussées sur un aspect de la Première Guerre mondiale plutôt méconnu en France : la guerre au Moyen-Orient. Si Gallipoli implique des troupes française, certes en nombre mesuré, alors que la campagne de Salonique (cf Le Front d’Orient de Max Schiavon) constitue le grand engagement français en Orient en 1914/1918, le contingent terrestre des forces françaises est au contraire extrêmement réduit –pour ne pas dire symbolique- dans la campagne de Syrie/Palestine, ainsi que les opérations menées depuis le Hedjaz (voir Du Caire à Damas de Rémy Porte). Sans oublier ni négliger ces aspects, l’auteur nous convie ici à une autre histoire, fort instructive, centrée sur l’action de la marine française. Christophe Mommessin prend de la hauteur en replaçant les événements dans le temps long, nous gratifiant ainsi d’une première partie, aussi longue qu’intéressante, sur la France et la « question d’Orient » depuis des siècles, établissant ainsi le lien entre l’action de nos forces et de notre diplomatie au cours de la Grande Guerre et ce qui fût la politique françaises en d’autres temps.
On ne peut résumer la richesse des informations données par l’auteur. Notons simplement qu’on apprend beaucoup, que les chapitres nous offrent un éclairage bienvenu sur les dessous diplomatiques de la guerre en Orient, au-delà de l’importance accordée au pétrole, le sionisme et les fameux accords Sykes-Picot. La complexité des lieux teint aussi de l’imbrication des religions, des cultures et de peuples et tribus aux antagonismes fluctuants. On croise ainsi des espions, parfois improbables comme le père Jaussen, ainsi que des célébrités, à commencer par Lawrence d’Arabie (dont le rôle magnifié par Hollywood est replacé à sa juste mesure) et son alter ego français, Louis Massignon. Les rapports entre les deux individus, ainsi que les manœuvres britanniques (certes compréhensibles) pour évincer les Français de toute présence en Syrie sont du plus haut intérêt (voir aussi à propos de l’éphémère Légion d’Orient). On mesure combien des îlots apparemment insignifiants, comme Zuqar ou les îles Farasan en Mer Rouge mais surtout Rouad et Castellorizo en Méditerranée (l’objet d’une étude très fouillée et centrale dans cet ouvrage), peuvent revêtir une importance stratégique et diplomatique insoupçonnée. Le propos ne s’arrête pas avec la défaite des Empires Centraux, mais se poursuit avec le récit des événements d’après-guerre, mettant en lumière les raisons de l’échec des Français à s’établir en Anatolie, ainsi que celui de Faycal, que Lawrence a vainement mis en avant pour contrer les ambitions françaises.
Les cartes et les photographies sont appréciables. On regrettera cependant l’absence d’index, même si la table des matières, dense, facilite la recherche.
Une belle lecture, chaudement recommandée. Christophe Mommessin est donc l’un de ces nombreux écrivains de talent que compte (ou a compté) notre armée.
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